Explorez la riche histoire des Antilles, des Arawaks et des Caribes indigènes à l'arrivée des Européens dirigés par Christophe Colomb. Découvrez le choc des cultures, l'essor de la piraterie et l'héritage complexe de la colonisation. Plongez dans l'histoire de la Martinique, de ses racines indigènes à l'abolition de l'esclavage, et à la transformation moderne de l'île en un département d'outre-mer français.
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Les Antilles à l’ère des Caraïbes
Avant l’arrivée des européens, les Antilles étaient peuplées par les Arawaks, puis par les Caraïbes, des peuples amérindiens. Ces derniers, originaires d’Amérique du Sud, de l’actuel Venezuela, ont colonisé les îles des Antilles en suivant les courants marins depuis Trinidad entre 560 et 300 avant Jésus-Christ. Ils repoussent et assimilent les méso-indiens déjà présents sur place. Ils tuèrent les hommes gardant uniquement les femmes et les enfants. C’est pou…
…rquoi les Caraïbes appelaient cette île, “l’île aux femmes” ou “Matinino”, (et non Madidina comme on le croit souvent). Selon leur tradition orale, ils revenaient régulièrement sur l’île afin de prendre les enfants mâles en âge de devenir des guerriers, et laissaient femmes et enfants sur place.
Certaines sources attribuent la découverte de la Martinique à Juan de la Cosa, un conquistador espagnol, en 1500. On trouve dans une carte de cette époque mentionnée sous le nom de Joanacera, (qui est le nom améridien de la Martinique), ou Ioüanacera, (qui pourrait signifier “île des iguanes”). Mais c’est Matinino qui restera, et qui sera utilisé dans les cartes des époques successives. Toutefois, le nom évoluera en “Matinina”, avant de devenir “Madinina” dans une carte italienne du XVI e siècle.
L’île était alors couverte de forêts, et les indiens vivaient dans des carbets. Sans murs et conçu pour y attacher facilement des hamacs, le carbet est un abri en bois typique des cultures amérindiennes. Les Caraïbes vivaient de la pêche, de la chasse et de la culture du manioc qu’ils avaient introduit sur l’île. L’arrivée des européens va profondément bouleverser ces sociétés, et provoquer leur disparition en moins de cinquante ans seulement.
L’arrivée des premiers européens avec Christophe Colomb
Les européens découvrent le “nouveau monde” en 1492 sous l’impulsion du navigateur génois Christophe Colomb. C’est lors de son deuxième voyage, le 11 novembre 1493, jour de la Saint Martin qu’il aperçoit une île au large qu’il nomme Martinique en l’honneur du saint de ce jour. Mais ce ne sera que lors de son quatrième voyage en 1502, que le navigateur posera le pied sur la terre ferme au Carbet.
A l’origine, les européens furent très bien accueillis par ceux qu’ils nommèrent les “indiens”. Les compagnons de Colomb, et leurs successeurs en particulier les conquistadores espagnols, répondirent à cette hospitalité par des massacres. Ce ne fût qu’une fois le dernier améridien exterminé que les colons se trouvèrent dans la situation délicate de ne pas pouvoir exploiter les terres à cause de la chaleur étouffante. Car ces terres, si fertiles, étaient vite rattrapées, et englouties, par la forêt vierge.
La découverte de l’Amérique suscita un très fort engouement parmi toutes les nations européennes qui entrèrent bientôt dans une vive rivalité pour s’en accaparer les richesses. L’Espagne, le Portugal, la France, la Hollande et l’Angleterre voulurent dès lors posséder de vastes colonies en Amérique.
Cette rivalité se mua rapidement en batailles navales dans la mer des Caraïbes entre corsaires, flibustiers et écumeurs de mer, au service des différentes nations. Puis en guerres des ces puissances pour étendre, ou défendre, leur domaine colonial.
La Compagnie des îles d’Amérique
C’est en 1626 sous le règne de Louis XIII que fût fondée la Compagnie des îles d’Amérique sous l’autorité du Cardinal de Richelieu. Le but de cette entreprise était de peupler et d’exploiter ces terres, sous l’autorité du Roi. C’est en vertu d’un accord passé avec cette compagnie que Liyénart de l’Olive et Duplessis d’Ossonville débarquèrent à la Martinique et prirent possession de l’île le 25 juin 1635.
L’expédition comportait deux sortes de colons : les habitants et les engagés. Les habitants venaient avec leur famille, et emmenaient avec eux des engagés dont ils payaient le voyage et la nourriture. Leur nom venait du fait qu’ils avaient pris l’engagement de servir l’habitant pendant trois ans. Ces engagés vivaient dans une situation semblable en tous points à celle des esclaves. Ils devaient effectuer comme eux les travaux les plus pénibles, étaient fouettés, torturés, et même parfois vendus pendant la durée de l’engagement.
A l’issue de leur engagement, s’ ils survivaient, les malheureux recevaient de l’État une concession de terrain de 25 hectares. Les conditions étaient tellement difficiles que les engagés avaient peu de chances de survivre à un tel traitement, et si par miracle ils y parvenaient ils étaient vulnérables au climat et aux maladies tropicales. Dans ces conditions, les engagés étaient rapidement décimés, et il devient difficile d’en recruter de nouveaux. Dans ce but, la durée d’engagement a ensuite été réduite de moitié.
L’expédition française initiale comportait 40 habitants et leurs familles accompagnés de 500 engagés environ. Après un débarquement au Carbet, ils prirent possession de l’île le 25 juin 1635. Mais après une exploration des environs, et après avoir rencontré beaucoup de serpents, ils considèrent le relief trop accidenté et décident de quitter l’île pour la Guadeloupe voisine où ils débarquent le lendemain.
Corsaires, écumeurs de mer et flibustiers
La période de la ruée vers le Nouveau Monde correspond également à l’âge d’or de la piraterie de 1630 à 1730 environ. Mis à l’honneur par des romans, des films, ces histoires de pirates se déroulent dans les mers des Caraïbes. Barbe noire, Rackham le rouge, ces noms continuent de charrier leur lot de légendes et de récits hauts en couleurs. L’occasion pour nous de revenir sur ces notions qui sont parvenues jusqu’à nous non sans confusion.
Un pirate est avant tout un hors la loi qui n’obéit à aucune autorité. En conséquence, il était exécuté en cas de capture. La piraterie a toujours existé, depuis l’antiquité et existe encore de nos jours en mer de Chine, ou en Afrique de l’Est. Les pirates avaient leurs propres règles, notamment en ce qui concerne le partage du butin, et même une sorte de “sécurité sociale” qui accordait une compensation pour la perte d’un œil, d’un doigt ou d’une jambe. En revanche, pas de butin, pas de solde.
Un corsaire est lié à une nation (France, Hollande, Angleterre, Espagne), et attaquait les navires civils pour le compte de la puissance qui lui a confié une “lettre de course”. En cas de capture, les corsaires étaient considérés comme prisonniers de guerre, et donc n’étaient pas condamnés à mort. Parmi les plus célèbres, le corsaire anglais Sir Henry Morgan qui attaquait les bateaux espagnols dans les Antilles. En temps de paix, les corsaires basculent souvent dans la piraterie. Et parfois même en temps de guerre, ils étaient considérés comme pirates par les armées ennemies.
Un boucanier est souvent un aventurier, ou un déserteur d’une armée européenne resté sur place dans le nouveau monde. Les boucaniers vivaient sans chef, et s’étaient spécialisés dans le ravitaillement des bateaux de passage, quels qu’ils soient. Ils élevaient des boeufs, et des cochons, dont ils fumaient la viande. De la viande boucanée dont ils approvisionnaient les navires, ils ont gardé le nom. Ils disposaient de comptoirs commerciaux sur quelques îles des Caraïbes.
Un flibustier est un européen ayant fui les guerres, persécutions religieuses, ou la pauvreté des grandes villes du vieux continent pour trouver refuge aux Antilles. Ils sont principalement installés sur l’île de la Tortue, au large d’Haïti.
L’île servait alors de port d’escale et de ravitaillement pour les navires de pirates, corsaires, contrebandiers. Rapidement, ces aventuriers venus de toutes les nations (français, anglais, hollandais), prirent la mer et menèrent des opérations contre des navires. Prétendant mener ces expéditions pour leurs pays respectifs, leur statut juridique est ambigu. A mi-chemin entre le pirate et le corsaire, le flibustier se retrouve principalement impliqué dans des attaques visant des navires espagnols. En effet, beaucoup de flibustiers étaient hollandais, pays qui était sous domination espagnole et luttait pour son indépendance.
La colonisation de la Martinique à partir de 1635
Après la tentative infructueuse de l’Olive et Duplessis, c’est au tour d’un autre aventurier d’entreprendre la colonisation de la Martinique. Pierre Beslain, seigneur d’Esnambuc a déjà colonisé l’île de Saint Christophe (qui fut la première colonie française fondée aux Antilles, avant d’être cédée aux anglais après le traité d’Utrecht en 1703).
Fort de cette expérience, il obtient de la Compagnie des îles d’Amérique l’autorisation d’établir une colonie en Martinique. Partant de Saint Christophe en 1635 avec une centaine d’hommes en armes, il débarque sur Madinina le 1er septembre de la même année. Il fût particulièrement bien accueilli par les Caraïbes qui l’autorisent même à construire un fort dans la partie nord de l’actuelle ville de Saint Pierre.
Rappelé à Saint Christophe, Esnambuc confie l’île à Dupont, son principal lieutenant. Ce dernier n’écoute pas les instructions de se concilier les indiens, et des rixes violentes opposent bientôt les deux communautés. Les Caraïbes se soulèvent et sont écrasés en 1636.
La traite négrière et l’esclavage en Martinique
L’esclavage existait dés le début dans les colonies d’Amérique. En effet, avant même que la traite n’existe en Martinique, des esclaves étaient capturés aux espagnols, portugais ou hollandais, et se retrouvaient vendus à des habitants qui les employaient au défrichement de leurs sols et à l’exploitation de leurs domaines. Ces malheureux pouvaient néanmoins trouver refuge auprès des indiens Caraïbes qui leur offraient l’hospitalité et leur permettaient de fuir. Ces fugitifs prirent le nom de “nègres marrons”.
La traite est tolérée depuis 1667, à la suite de la diminution d’engagés blancs décimés par les maladies, les guerres et les mauvais traitements. En 1685, la colonie comptait déjà plus de 10 000 esclaves africains. Le maître pouvait faire ce qu’il voulait de son esclave, le battre, le torturer même, aucune loi ne régissait cette pratique. L’esclave quant à lui était considéré comme un objet mobilier.
En 1685, Colbert fit paraître une ordonnance, le “Code Noir”. Celui-ci réglementait la condition des esclaves dans les îles d‘Amérique, mais du même coup consacrait définitivement la pratique de l’esclavage dans les colonies françaises.
Les dispositions du Code Noir concernaient tous les aspects de la vie quotidienne, ainsi que les rapports entre maîtres et esclaves. Religion, obligations des maîtres, châtiments corporels, mariages et descendances, tout était réglé par des lois.
Plus tard, sous le règne de Louis XV, les dispositions du Code Noir furent remises en question. Ainsi en 1720, le maître qui voulait affranchir son esclave devait en demander l’autorisation au gouverneur. 1736, interdiction aux colons de baptiser comme libres leurs enfants nés d’une mère esclave. 1743, les marrons se voient infliger la peine des jarrets coupés en cas de capture. Pour les Caraïbes en revanche, et les indiens en général, le roi accordait l’affranchissement.
En 1783, on comptait en Martinique une population de 77 000 habitants, comprenant 60 000 esclaves, 5 000 hommes de couleur et 12 000 blancs.
La longue route vers l’abolition de l’esclavage
Lors de la période révolutionnaire, la société martiniquaise était définitivement fracturée. Les intérêts économiques des riches planteurs les opposent à la bourgeoisie des villes formée par des négociants et des marchands. Les hommes de couleur veulent l’églité avec les blancs et les esclaves la liberté.
Leurs revendications étaient alors soutenues en métropole par la Société des Amis des Noirs présidée par l’Abbé Grégoire. Mais l’esclavage avait aussi ses farouches partisans, regroupés dans le Club de l’Hôtel de Massiac.
Ce conflit larvé devait s’aggraver au fur et à mesure que la métropole était gagnée par les idées révolutionnaires. Les habitants des villes prirent le parti de la Révolution, tandis que les planteurs restèrent fidèles à la royauté.
De nombreux troubles civils éclatèrent dans l’île entre les deux camps. En 1794, les anglais avaient pris la ferme décision de s’emparer de la Martinique, après de nombreuses tentatives infructueuses dans le passé. Les partisans de l’Ancien Régime se joignent aux anglais contre les forces républicaines qui dirigent l’île.
La Martinique resta sous occupation anglaise pendant sept ans, de 1794 à 1801. Ce qui empêcha l’application de la loi du 4 février 1794 qui abolissait l’esclavage. Après le retour de l’île dans le giron français en 1802, la loi restait tout de même en vigueur. Mais le premier consul Bonaparte fit promulguer un nouveau décret qui rétablissait l’esclavage et la traite dans les colonies.
Napoléon était marié à Joséphine de Beauharnais qui était une créole martiniquaise, l’impératrice a t-elle eu une influence sur la décision de son mari de rétablir l’esclavage pour satisfaire les planteurs ?
La traite fut finalement abolie bien plus tard sous la Restauration par Louis XVIII par une ordonnance royale du 8 janvier 1817. Si il était dorénavant interdit d’amener des esclaves dans les colonies, l’esclavage lui perdurait. Les hommes de couleurs et les esclaves affranchis bénéficiaient certes d’une liberté relative mais devaient respecter des lois humiliantes et inégalitaires.
En 1822, les esclaves se révoltent. La répression est féroce. Mais la grogne gagne maintenant les hommes de couleur libres et affranchis qui réclament l’égalité civile et politique. Certains se rendent à Paris où ils adressent au Roi un document dans lequel ils exposent leur situation et les injustices qu’ils subissent.
Les colons réagirent brutalement et les meneurs furent condamnés aux galères en 1824. Quatre ans plus tard, en 1828, ils furent enfin rétablis dans leur liberté et leurs droits. On retient le nom de Benjamin Constant, un député qui défendit courageusement la cause des opprimés. Entre 1830 et 1833, le gouvernement de Louis Philippe modifia profondément le droit colonial et accorda aux hommes de couleur libres et aux affranchis les droits civils et politiques.
Il facilitait aussi l’affranchissement des esclaves, abolit les cachots dans lesquels ils pouvaient être enfermés par leurs propriétaires, abolit le marquage et les mutilations, et interdit l’utilisation d’armes à feu dans les poursuites d’esclaves fugitifs. Des écoles furent créées pour les jeunes esclaves de 8 à 14 ans.
Mais ces adoucissements ne pouvaient que retarder l’échéance. Les esclaves se révoltèrent par deux fois. A Saint Pierre en février 1831, et à Grande Anse en décembre 1833.
En Angleterre, le parlement avait aboli l’esclavage sous pression de l’opinion publique en 1833. En France, la lutte fut très vive entre esclavagistes et abolitionnistes.
C’est finalement la révolution de 1848 qui mit fin au débat. Le nouveau gouvernement s’empressa d’adopter la proposition de Victor Schoelcher qui stipulait que “nulle terre française ne pouvait porter d’esclaves”. Le décret d’abolition préparé par Schoelcher fut adopté le 27 avril 1848.
Mais les principaux intéressés, les esclaves, n’entendent pas patienter jusqu’à l’application du décret, et se révoltent massivement le 22 mai 1848 pour briser leurs chaînes. L’esclavage est ainsi aboli dés le lendemain par le gouverneur de l’île Claude Rostoland. C’est cette date du 22 mai 1848 qui est commémorée comme la date réelle de l’abolition. Ainsi, ce sont les esclaves martiniquais qui se sont libérés eux-mêmes sans attendre que ce soit officiel.
Après l’abolition, les planteurs ont eu recours à l’importation de main-d’œuvre étrangère, parmi lesquels des chinois, indiens et africains.
1902 : Éruption de la montagne Pelée
Le 8 mai 1802 reste dans l’histoire comme l’éruption volcanique la plus meurtrière du XX e siècle. Saint Pierre la plus grande ville de la Martinique est détruite en quelques minutes par le volcan Montagne Pelée et ses habitants décimés, soit plus de 30 000 personnes.
Les victimes ont succombé à l’onde de choc, à l’inhalation de gaz brûlants ( + de 1000 °C), aux brûlures, incendies et ou prisonniers de la destruction de bâtiments. Cette nuée ardente dévasta tout sur son passage jusqu’à atteindre les bateaux au mouillage dans le port qui furent carbonisés. La ville brûle pendant plusieurs jours sans qu’il ne soit possible d’en approcher à cause de la chaleur intense.
Parmi les rares survivants : Louis-Auguste Cyparis, un prisonnier protégé par les murs épais de son cachot; et Léon Compère-Léandre, un cordonnier qui vivait en périphérie de la ville.
Saint Pierre, surnommé le “Petit Paris des Antilles” était la capitale économique et culturelle de la Martinique. Son port florissant accueillait de nombreux navires marchands du monde entier venus chercher le sucre et le rhum produits sur l’île.
Cette catastrophe est considérée comme la catastrophe naturelle la plus importante du siècle et a profondément marqué les esprits des martiniquais.
La Martinique de nos jours
La seconde guerre mondiale voit la Martinique coupée de la métropole. Les ressources sont rares, et l’approvisionnement en nourriture ne tient que grâce aux ravitaillements américains. La Martinique maintient une neutralité dans le conflit, mais la population se soulève contre le représentant du régime de Vichy sur l’île qui est contraint au départ en 1943.
La Martinique se rallie à la France libre dans la foulée. La période d’après-guerre est marquée par une grande pauvreté dans les Antilles. De fortes revendications sociales, et politiques, émergent.
Devenue département français d’Outre Mer en 1946 grâce à l’action du jeune député-maire Aimé Césaire, la Martinique se lance dans sa décolonisation. L’égalité de droits complète ne sera acquise qu’en 1996, sous la présidence de Jacques Chirac, et les martiniquais ont enfin droit aux mêmes aides sociales que les français de métropole.