Le café en Martinique, une institution

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Quand on pense à la production agricole de Martinique, ce sont d’abord des images de canne à sucre, de bananes, de fruits exotiques qui jaillissent dans notre esprit. Or, c’est un peu oublier qu’il existe d’autres cultures d’excellence dans l’île aux fleurs. Le café et le cacao en sont des exemples parfaits, leur culture était un peu tombée en désuétude avant de retrouver un nouveau souffle récemment. Partons à la découverte de ces deux richesses méconnues de la Martinique.

Le café en martinique : une histoire remarquable

Si il y a bien quelque chose qui mette tout le monde d’accord, c’est bien le café. Tout d’abord parce que le café est un des rares termes qui soient universels, c’est le même mot dans toutes les langues. C’est bien la preuve d’une passion commune pour cette boisson qui fait l’unanimité. L’origine du mot est déjà toute une aventure, et un parfait résumé de son histoire !

Les origines du café seraient à chercher du côté de la province éthiopienne de “Kaffa”. Mais ce sont les arabes qui en maîtrisent la culture au XV e siècle au Yémen, c’est là qu’il prend ce nom si familier de “qahwa”. Passé par l’Empire Ottoman, il devient “kahvé”, puis enfin “caffè” après un petit passage chez les vénitiens qui en assuraient l’importation dans le vieux continent.

Le café était alors une boisson très populaire dans le monde musulman, et les lettrés et les savants de l’Empire Ottoman aimaient se retrouver dans les “maisons du café”. Dès 1610, le mot café est attesté dans le royaume de France, c’est même dans la ville de Marseille qu’apparaît le premier établissement servant ce breuvage. Rappelons que par la suite, le mot “caoua” emprunté aux dialectes du Maghreb sera très employé en France, via notamment l’argot militaire d’Afrique.

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Histoire du café en Martinique

L’arrivée du café en Martinique est une histoire tout aussi remarquable. On considère l’île comme la “porte d’entrée” du café dans le nouveau monde. Nous sommes au XVIII e siècle, la boisson rencontre le même succès en Europe qu’en Orient. Des “maisons du café” existent dans toutes les villes européennes, dans lesquelles se retrouvent les intellectuels, les artistes, les poètes.

En 1714, le maire d’Amsterdam offre un jeune caféier au roi Louis XIV qui l’implante avec succès dans les serres du jardin du Roi. L’adaptation se fera si bien qu’il se reproduisit et servit de souche à tous les caféiers des îles d’Amérique. En 1716, c’est la première tentative d’implantation de trois plants de caféiers en Martinique par le botaniste d’Isemberg. L’entreprise se solda par un échec, la fièvre jaune emportant le scientifique peu de temps après son arrivée sur l’île.

Il faut attendre quatre ans pour voir se concrétiser une nouvelle tentative par un militaire du nom de De Clieux. Là encore, l’entreprise a bien failli ne jamais aboutir. Bravant une traversée aux milles périls, entre les tempêtes et les pirates, De Clieux devait prendre soin de trois précieux plants de caféier.

Alors que l’eau se faisait rare durant la longue traversée, celui-ci dû partager sa ration avec les plantes pour leur permettre de survivre. Arrivés à bon port, les plants furent plantés au Prêcheur sur les pentes fertiles de la montagne Pelée. Les premières récoltes eurent lieu en 1726 et furent abondantes, le climat tropical de la Martinique se prêtant particulièrement bien à la culture du café.

Devant ces résultats encourageants, des plants furent envoyés en Guyane, Guadeloupe et Saint Domingue. Selon les sources de l’époque, on dénombrait presque dix-neuf millions de caféiers en Martinique en 1777. En 1918, une stèle est dressée en l’honneur de De Clieux au jardin botanique de Martinique.

Mais pour les martiniquais le café a un arrière goût amer, tant son introduction dans l’île est étroitement liée à la traite négrière.

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Le café en Martinique aujourd’hui

Au fil des siècles la culture du café est tombée en désuétude au profit d’autres jugées plus rentables. Des plants de cafés subsistaient dans l’île chez des particuliers, il n’y avait plus de culture à grande échelle. Ainsi, la canne à sucre et la banane sont devenus prépondérantes dans l’île.

Ce n’est que très récemment, en 2014, que le Centre de Coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement a décidé de réintroduire le café en Martinique. Pour cela, ils ont cherché, et identifié, des plants de caféiers descendants des plants originels du XVIII e siècle. A l’issue de cette sélection, seuls trois arbres ont été sélectionnés de la variété “Arabica Typica” des origines.

Ensuite des boutures ont été plantées dans l’île à partir de 2017, notamment au sein du Parc Naturel Régional de Martinique. Le choix s’est porté sur trois zones principales : le Morne Vert, Bellefontaine et Fonds Saint Denis.

Au total, ce sont vingt hectares de caféiers qui sont plantés, avec la première dégustation symbolique en mars 2021. Le but, recréer une filière de café d’excellence en Martinique. Le café martiniquais est fruité, très équilibré, il s’inscrit dans la catégorie des cafés de belle qualité. C’est un retour aux sources pour le café martiniquais qui est parmi les meilleurs du monde, en effet tous les grands arabicas d’Amérique du Sud proviennent directement des variétés de Martinique.

Symbole de cette renaissance du café en Martinique, l’artisan torréfacteur Ti’Kafé installé aux Trois-îlets propose ses cafés “du grain à la tasse”.

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Histoire, plantation et récolte du caféier

Les Caféiers, appartenant au genre Coffea L. et à la famille des Rubiacées, sont des arbres ou arbustes originaires des régions tropicales d'Afrique et d'Asie. Avec plus de 130 espèces, ces plantes ont donné naissance à une boisson universellement consommée : le café. Les espèces les plus cultivées sont Coffea arabica et Coffea canephora, avec une mention spéciale pour Coffea liberica.

Le caféier d'Arabie, ou caféier commun (Coffea arabica), est un arbre qui ne dépasse généralement pas 9 mètres. Il se plaît à l'ombre d'arbres plus grands et est souvent taillé entre 2 et 3 mètres dans les plantations. Ses feuilles persistantes, d'un vert brillant, contrastent avec ses fleurs blanches et suaves. Les fruits, appelés "cerises", sont des drupes rouges ou violettes à maturité, renfermant les précieuses graines de café.

Le caféier robusta (Coffea canephora) est similaire à l'arabica. Il est cependant plus facile à cultiver, moins coûteux, et est souvent utilisé pour le café instantané. L'arabica reste le plus apprécié, mais le robusta trouve sa place sur des terrains inadaptés à l'arabica. Face au réchauffement climatique, la culture de C. stenophylla est envisagée comme alternative, car elle s'adapte à des températures plus élevées.

Les caféiers sont sensibles aux températures extrêmes, préférant les climats subtropicaux. L'arabica se développe en moyenne altitude, tandis que le robusta préfère les régions tropicales chaudes et humides en basse altitude.

Ces plantes sont malheureusement sujettes à de nombreux parasites, dont le plus redoutable est le champignon Hemileia vastatrix, causant la "rouille" du café.

La récolte des grains de café est un processus minutieux. Pour l'arabica, il faut attendre entre 6 et 8 mois après la floraison. Deux méthodes principales de récolte existent : le picking, où les cerises sont cueillies à la main une à une, garantissant une qualité supérieure, et le stripping, où toutes les cerises sont cueillies en même temps, nécessitant un tri ultérieur.

Après la récolte, le traitement du café commence. L'objectif est d'extraire le grain de la cerise. Ce traitement, réalisé de différentes manières, influencera grandement le goût final du café. Ainsi, du caféier à la tasse, chaque étape est cruciale pour obtenir une boisson d'exception.